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Pénurie d’eau : Le gouvernement dit stop à la culture de pastèques à Tata

Pénurie d’eau : Le gouvernement dit stop à la culture de pastèques à Tata

Comme c’est le cas pour plusieurs villes du sud du Maroc, la ville de Tata souffre depuis plusieurs années d’une pénurie d’eau qui ne cesse de s’aggraver. L’été dernier, les habitants de la région ont organisé plusieurs sit-in pour exprimer leur ras-le-bol quant au faible accès à l’eau potable et aux coupures très récurrentes de cette denrée.

Cette année, la situation est encore plus dramatique, compte tenu du déficit pluviométrique, combiné à la culture de pastèque dans la région, qui exige d’énormes quantités d’eau. Afin de minimiser les dégâts, le gouvernement a décidé de renoncer à la culture de pastèque à Tata.

Lors d’une conférence-débat sous le thème «L’eau comme enjeu marocain», tenue jeudi 3 mars 2022 à l’Institut supérieur de l’information et de la communication (ISIC), le ministre de l’Equipement et de l’Eau, Nizar Baraka, a annoncé que dans le cadre des mesures prises par le gouvernement pour faire face à la pénurie des ressources hydrauliques, la culture de pastèque à Tata sera interdite, étant donné que celle-ci consomme de grandes quantités d'eau, durant deux ou trois mois de l’année.
 
En effet, la culture de pastèque nécessite un sol chaud et humide en plus de températures journalières moyennes élevées. Des critères auxquels justement répond la région de Tata, ce qui suscite l’engouement de plusieurs agriculteurs pour cette culture, qui en revanche provoque des dégâts collatéraux. «La culture de pastèque figure parmi les cultures les plus consommatrices d’eau. Par exemple, la production d’un kilogramme de pastèque exige 60 litres d’eau. Cela a conduit plusieurs pays, notamment l'Espagne à limiter la superficie dédiée à la culture de pastèque», souligne Brahim El Anbi, ingénieur agricole.
 
Pour obtenir un bon rendement, il est indispensable de consommer plusieurs milliers de mètres cubes d’eau, ce qui met à rude épreuve les ressources hydrauliques des zones arides, telles que celles de Tata. «La superficie cultivée au titre de la campagne 2021 a atteint 20.000 hectares (ha), contre 4.500 ha en 2014 et 2.500 ha en 2010, avec un rendement à l’hectare qui s’élève à 60 tonnes. Imaginez donc la quantité d’eau qui a été consommée», précise Mohamed Benabou, expert en climat et développement durable et spécialiste en ingénierie environnementale.
 
Et d’ajouter : «La décision prise par le gouvernement intervient au moment où la ville de Tata souffre d’une pénurie d’eau, ce qui signifie que la nappe phréatique est surexploitée. Le problème est que cette exploitation se fait entre mi-décembre et mi-février, laissant ainsi la région sous l’effet du stress hydrique. Cette interdiction ne signifie pas un arrêt de la production, mais ça reste plutôt une manière pour montrer aux gens que ce type de culture épuise nos ressources hydrauliques».
 
Certes, l’interdiction de la culture de pastèque à Tata va permettre une meilleure gestion de l’eau, cependant, cette décision risque d’impacter le niveau de vie de la population locale. «La culture de pastèque génère plusieurs offres d’emploi dans la région. Suite à cette décision, la hausse du taux de chômage dans la région est donc inévitable», estime Brahim El Anbi.
 
Pour Mostapha Rouasse, militant associatif de la même région, cette décision gouvernementale est «inadéquate du fait qu'elle a recours à la solution la plus simple qui est la prévention, mais il aurait mieux valu que le gouvernement précédent trouve des mesures pour réduire les écoulements évalués à des milliards de mètres cubes d'eau, transportés par les différents affluents chaque année et qui se déversent soit dans l’océan soit dans le sable des provinces du sud et du sud-est». 
 
Dans la même veine, El Khalil Nouhi, activiste associatif à Tata, explique qu’il est primordial de «penser à l'aménagement des centaines de disques et de barrages fractionnés en vue de lutter contre l'érosion hydraulique et l'infiltration des eaux de ruissellement, cela permet l’enrichissement de la nappe phréatique et  prévoir aussi la régression des zones de culture des pastèques».
 
Tout en rappelant que la culture de pastèque contribue au développement local, notamment à travers sa création de différents emplois, ces militants associatifs se demandent si le gouvernement prévoit des mesures préventives de compensation aux revenus générés par cette culture, d'autant qu'ils contribuent dans le cadre de l'économie sociale à l'essor des femmes des oasis.

 

Par Meryem Ait Ouaanna

 

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