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France – Algérie : L’amour vache

France – Algérie : L’amour vache

Les relations entre les deux pays tournent au règlement de comptes diplomatique, avec de nouvelles expulsions de fonctionnaires français du territoire algérien. En toile de fond : un régime algérien qui instrumentalise continuellement le passé colonial et frustré par le rapprochement franco-marocain.

 

Par D. William

A voir les derniers échanges entre la France et l’Algérie, ou plutôt les derniers non-échanges, on se dit que le dialogue bilatéral n’est pas seulement gelé : il est cryogénisé. Le dernier épisode de cette glaciation s’est joué ce week-end, avec l’expulsion de nouveaux fonctionnaires français par Alger.

Des agents «en mission temporaire», comme les qualifient pudiquement les sources diplomatiques françaises, remerciés pour cause de… formalités non respectées. En langage diplomatique, cela donne : «affectations sans notifications officielles ni demandes d’accréditation appropriées».

En langage courant : vous êtes venus sans prévenir, merci de refaire vos valises. La France a promis de riposter «de manière immédiate», «ferme» et «proportionnée».

Cette énième scène est révélatrice d’un état relationnel bilatéral particulièrement délabré. Car depuis plusieurs mois, l’Algérie et la France s’adonnent à une joute qui montre l’ampleur du désamour croissant : expulsions, accusations protocolaires, convocations express, diplomates virés, rappel d’ambassadeur, notamment celui de France en Algérie, Stéphane Romatet… Tout y passe, sauf l’apaisement.

Trahison ?

Mais au fond, que se passet-il vraiment ? Pourquoi cette tension permanente ? Pourquoi ce goût prononcé pour le clash diplomatique ? En réalité, tout ce brouhaha n’a rien d’un accident diplomatique. Il résulte d’un glissement progressif. L’été dernier, Emmanuel Macron avait provoqué la colère du président algérien Abdelmadjid Tebboune en se rangeant du côté de la vérité historique, notamment en apportant un soutien clair et sans ambiguïté au plan marocain d’autonomie au Sahara, scellant de facto un alignement stratégique avec Rabat.

Une déclaration à haute teneur géopolitique, qui a été perçue à Alger comme une trahison pure et simple. Depuis, c’est l’escalade. Aujourd’hui, le torchon brûle sans que personne ne semble pouvoir réellement l’éteindre. Chaque geste est interprété comme une provocation. Même la visite de parlementaires français à Sétif pour commémorer les massacres du 8 mai 1945, a été regardée avec beaucoup de suspicion.

Le passé, décidément, n’en finit pas de jeter de l’ombre sur le présent. Parce que la relation francoalgérienne repose sur une mémoire qui divise plus qu’elle ne rassemble. Simplement à cause d’un pouvoir algérien qui use et abuse de la «rente mémorielle» pour exister et tenter de se légitimer. En cela, les gestes symboliques ne suffisent plus.

Les excuses non plus. Dans ce contexte, le rapprochement entre la France et le Maroc n’est pas qu’une divergence de vues sur le Sahara marocain : c’est un repositionnement stratégique que l’Algérie refuse d’accepter. Alger voit Rabat prendre de l’avance, sceller des partenariats robustes avec Madrid et Paris et devenir un hub d’investissement africain et un interlocuteur privilégié à l’égard de l’Occident.

Et cela irrite. Agace. Il n’est donc plus seulement question de diplomatie. Mais d’une rivalité régionale et d’un jeu d’équilibre qui bascule au détriment d’Alger. Et face à cette réalité, pour un pouvoir algérien obsédé par les avancées indéniables de son voisin et mû par la volonté de préserver ses privilèges indus, la seule riposte reste le repli sur soi, l’ingérence, l’agressivité et la victimisation permanente... Quand ce n’est pas Rabat, c’est Madrid, l’Alliance des Etats du Sahel (Mali, Burkina Faso, Niger), l’Union européenne ou encore Paris.

Conclusion : Alger est adepte de la diplomatie de l’absurde et de la rancune, qui se nourrit du réflexe de l’affrontement. Une diplomatie qui semble être l’expression permanente d’un contentieux mal digéré. Et dans cette nouvelle escalade avec Paris, ce sont les populations des deux pays, qui partagent une histoire humaine, familiale et culturelle bien plus dense et chaleureuse que les communiqués des chancelleries, qui en payent le prix. Les Français d’origine algérienne, les étudiants, les entrepreneurs… sont les premiers otages d’une relation devenue illisible. Une relation prise dans les filets de l’arithmétique politicienne et, surtout, reflet des humeurs et des errements du pouvoir algérien. 

 

 

 

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