«Je souhaitais commencer ce discours en disant que nous nous réunissons pour condamner les pratiques d’un pays qui bride les droits de l’Homme, oppresse les voix contestataires et participe à la déstabilisation de l’Afrique. Mais alors, cela signifierait que nous parlons ici de l’Algérie. Or, la gauche européenne ne condamne jamais l’Algérie, et l’Union européenne lui passe tout, en espérant son gaz. A la place, nous débattons du Maroc qui est pourtant un des pivots de notre partenariat stratégique en Afrique», dixit Thierry Mariani, député français au Parlement européen (PE).
Cette intervention, prononcée lors de la résolution du PE exhortant «les autorités marocaines à respecter la liberté d'expression et la liberté des médias» et à «améliorer concrètement la situation des droits de l'Homme au Maroc», résume à elle seule toutes les analyses que l’on peut faire sur cette mascarade et cette vile manœuvre qui participent d’un véritable cynisme politique. Mais encore faut-il que la subtilité de cette déclaration ait été comprise par ces «intelligences» qui ont voté cette résolution. Pas sûr qu’ils en aient perçu la substance. Parce que le diable est dans les détails, que seul un esprit éclairé peut déceler. Eclairons alors leur lanterne !
Primo : Ces… brillants esprits préfèrent désigner le Maroc comme un épouvantail au lieu de s’attaquer à une Algérie qui fait à l’Union européenne un perfide chantage gazier à peine voilé.
En juin 2022, un document confidentiel de l’OTAN stipulait à juste titre que «comme la Russie, l’Algérie utilise l’approvisionnement en gaz comme moyen de pression politique», qualifiant notamment l’Algérie de «risque pour la sécurité de l’Europe».
En décembre dernier, Susana Solís Pérez, eurodéputée espagnole, est revenue à la charge, estimant que «dans le contexte de la guerre de Poutine en Ukraine, l'utilisation par l'Algérie de l'approvisionnement énergétique comme arme politique a des conséquences directes pour les citoyens de l'UE». Dans un écrit adressé à la Commission européenne, elle a soulevé deux interrogations pertinentes :
• La Commission considère-t-elle toujours l'Algérie comme un partenaire fiable en matière d'approvisionnement énergétique ?
• La Commission a-t-elle envisagé la possibilité que l'Algérie agisse à la demande de la Russie afin d'aggraver la crise énergétique de l'UE ?
Alors, les eurodéputés portent-ils des œillères ou considèrent-ils que leurs élucubrations sur la soi-disant situation des droits de l’Homme au Maroc sont plus importantes que la menace que fait peser l’Algérie sur l’UE ? Dans un cas comme dans l’autre, il faut s’inquiéter du mandat représentatif que leur ont donné les citoyens européens.
Secundo : Les parlementaires européens préfèrent diaboliser le Maroc et offrir au pouvoir algérien un blanc seing sur le terrain des droits de l’Homme. Ironie du sort, le dimanche 22 janvier courant, la Ligue algérienne de défense des droits de l'Homme (LADDH) a annoncé avoir appris sa dissolution via les réseaux sociaux. Le jugement actant sa dissolution a été rendu à son insu il y a six mois, à l'issue d'un procès tenu en son absence. La LADDH estime qu’elle «paye» son «engagement pour la démocratie, les libertés et les droits humains».
On vous épargne aussi l’ignominie de ce qui se passe dans les camps de Tindouf, mais également les intimidations, les exactions, les arrestations et emprisonnements arbitraires, ainsi que les violations des droits civils et politiques par le pouvoir algérien pour museler la contestation populaire et se maintenir au pouvoir. Au point que des experts de l’ONU ont accusé le régime algérien d’«instrumentaliser politiquement le terrorisme» pour réprimer les libertés publiques. Bref, en matière de violation des droits de l’Homme, il y a à manger et à boire en Algérie.
Mais nos fameux eurodéputés préfèrent taire tout cela et choisissent de courber l’échine pour ne pas fâcher Alger. C’est… un choix, ou plutôt une mauvaise foi criarde qui ne fait guère honneur aux institutions européennes et qui, surtout, décrédibilise l’UE.
Par D. William