On se lasse de plus en plus de la parole politique. Surtout qu’elle devient de plus en plus inaudible au sein de la population. Entre les éternelles promesses non tenues et la culture de la langue de bois, il est donc légitime que les citoyens prennent une certaine distance vis-à-vis des politiques.
J’ai quand même envie de poser une question : que vaut, actuellement, la parole du chef de gouvernement, Saad Eddine El Othmani ?
Moi, en tout cas, je m’en méfie. Et je vais vous donner juste un seul exemple pour justifier cette méfiance. Rappelons-nous, en effet, ce qui s’est passé fin juin dernier lors de la suspension, à la dernière minute, de l’entrée en vigueur de la réforme du régime de change.
El Othmani s’était alors employé, dans un maladroit exercice de communication, à expliquer les raisons de cette suspension. A la télévision, devant des millions de téléspectateurs, il a dit qu’il fallait d’abord «étudier certains impacts». De cette sortie médiatique spectaculaire, on aura retenu qu’une seule chose : c’était un jeu de dupes, car El Othmani avait tout dit ce jour-là, sauf la vérité. Car la vérité est que le gouvernement a eu une peur bleue, eu égard notamment aux mouvements spéculatifs qui ont eu lieu quelques jours auparavant sur le Dirham.
D’ailleurs, El Othmani a-t-il demandé à Abdellatif Jouahri et à son équipe des études d’impact complémentaires ? Jusqu’aux dernières nouvelles, non. Demander cela aurait d’ailleurs été une insulte envers la Banque centrale, puisque cela suppose que cette dernière n’a pas verrouillé, comme elle devait le faire, tous les aspects techniques de la réforme.
Le nouveau régime de change est donc entré en vigueur, sans études complémentaires (sic !) et, surtout, sans tambour ni trompette. Autrement dit, sans l’annonce préalable d’une date. Du moins, le gouvernement a prévenu l’opinion publique vendredi fin d’après-midi, avec effet lundi, supprimant ainsi toute possibilité de spéculation sur la monnaie. Et il a réussi son coup. Et c’est tout ce qu’il voulait. Qu’importe alors ce qu’a dit El Othmani devant des millions de téléspectateurs.■
D. W.