Aujourd’hui, est analphabète non pas celui qui n’aura pas appris à lire, mais celui qui n’aura pas appris à apprendre.
La crise de l’éducation nationale est propice pour soulever d’autres questions toujours en relation avec la quête du savoir et l’enseignement dans notre cher pays.
C’est aussi une occasion de revenir sur l’état de l’analphabétisme qui sévit toujours au Maroc, et dont les chiffres font état d’une situation inextricable qui demande des mesures adéquates pour faire en sorte que tous les Marocains soient scolarisés, qu’ils fassent tout leur cursus scolaire et qu’ils aient accès au savoir.
C’est dans ce sens que les chiffres avancés par l’Agence nationale de lutte contre l’illettrisme sont importants à analyser.
Ces données font état de dix millions de citoyens marocains, sur un total de 36,47 millions d’habitants, qui ne savent ni lire ni écrire. Cela fait beaucoup. Sans compter tous ceux qui ont quitté l’école très tôt et qui ont de graves lacunes en termes de savoir. A ceux-ci s’ajoutent tous ceux qui ont eu une éducation coranique, comme c’est toujours le cas dans les milieux ruraux. Ces personnes ne savent lire que dans la langue du Coran, tout comme tous ceux qui ne parlent et n’écrivent qu’une seule langue.
Feu SM le Roi Hassan II avait dit cette phrase si juste : celui qui ne parle qu’une seule langue est analphabète. Et c’est vrai.
Surtout aujourd’hui dans un monde où les défis sont multilingues et nécessitent des États de tout miser sur l’éducation, sur les écoles, sur l’enseignement et sur la quête du savoir dans toutes ses manifestations et ramifications.
Ce qui n’est pas du tout le cas du Maroc, avec un système éducatif qui souffre de plusieurs maux, un déficit criant en savoir et en connaissance, des niveaux éducatifs en deçà de la moyenne, un désintérêt porté à la culture, les invasions barbares de la médiocratie, l’acharnement népotiste contre la méritocratie… Le Maroc a du souci à se faire face à cette terrible problématique de l’ignorance, de l’indigence intellectuelle et de l’analphabétisme.
Parce qu’aujourd’hui, est analphabète non pas celui qui n’aura pas appris à lire, mais celui qui n’aura pas appris à apprendre.
Sans oublier qu’un peuple analphabète, sans savoir, devient un peuple sans mémoire, il devient également un peuple qui brade son histoire.
Pourtant, au Maroc, on se gargarise à satiété des exploits des différentes méthodes éducatives qui ont toutes, au fil des décennies, montré leurs limites, et pour certaines, leur absurdité et leur aberration. Comme cette hérésie, à une certaine époque, où l’on a voulu tout arabiser. Ce qu’il faut se dire aujourd’hui, dans un Maroc en profonde mutation, un Maroc de défis tous azimuts, c’est que sans tout miser sur l’éducation, l’enseignement et la connaissance, le pays va encore accuser des retards dans de nombreux domaines.
Tant qu’on s’emmêle encore les pinceaux avec l’ignorance et la médiocrité qui est aujourd’hui portée aux nues, nous faisons beaucoup de mal à ce pays. Car les chemins de l’Histoire n’acceptent plus aucun retard en termes d’alphabétisation des peuples.
L’équation est au premier degré : vous voulez compter parmi les nations solides aujourd’hui, misez sur la culture, sur les sciences, sur les technologies, sur l’héritage, sur une jeunesse qui aime le savoir et qui le fructifie, parce qu’un peuple éduqué sera toujours un peuple responsable.
Docteur Imane Kendili, Psychiatre et auteure