Le chantier de réforme du système pénal marocain tend à répondre à la problématique de la peine de mort, dans le cadre des efforts visant l'harmonisation du système judiciaire national avec les chartes internationales et les recommandations et observations des organes des Nations Unies relatives aux droits de l'Homme, a affirmé, vendredi à Rabat, le ministre de la Justice, Abdellatif Ouahbi.
Intervenant à l'occasion de l’Assemblée générale de la Coalition marocaine contre la peine de mort, Ouahbi a souligné que la peine de mort fait toujours l'objet d'un grand débat sociétal et est considérée comme l’un des points-clés de la réforme de la justice pénale, relevant que "l'orientation de la politique pénale marocaine reflète l'interaction positive du Royaume avec la résolution n° 77/2002 de l'ONU" sur la peine de mort, adoptée par le "Comité des droits de l'Homme" en avril 2002.
Lors de cet événement, organisé par la Coalition en partenariat avec l'Observatoire marocain des prisons et l’ONG "Ensemble contre la peine de mort", le ministre a indiqué que le Maroc s'engage dans un chantier législatif important destiné à réformer la justice pénale, conformément aux chartes internationales ratifiées par le Royaume, dont la Constitution garantit, dans son préambule, le respect des principes, droits et devoirs qu'elles imposent.
Ce chantier, a-t-il enchainé, est également conforme aux aboutissements du dialogue national approfondi et global sur la réforme du système judiciaire, aux recommandations émises par l’Instance Équité et Réconciliation, ainsi qu'aux observations et problèmes soulevés de la pratique sur le terrain, ajoutant que cette réforme s’assigne aussi pour objectif d’accompagner l’évolution des systèmes pénaux modernes.
Selon Ouahbi, la politique pénale marocaine se dirige vers l'abolition progressive de la peine de mort à travers plusieurs mesures, notamment en proposant la réduction, au maximum, du nombre d'articles de loi prévoyant la peine de mort, et la condamnation du co-auteur à la réclusion à perpétuité si la peine pour son acte est la mort.
Pour sa part, le coordinateur de la Coalition marocaine contre la peine de mort, Abderrahim Jamaï, a exprimé son espoir d'une "interprétation minutieuse" de l'article 20 de la Constitution de 2011, qui "considère le droit à la vie comme étant le premier droit de tout être humain et garantit la protection de ce droit par la loi".
L’abolition de la peine de mort exige l'implication de tous les acteurs concernés, a-t-il insisté, indiquant que la coalition oeuvre à élargir la base des contributeurs à la diffusion de la culture de l'abolition de la peine de mort.
De son côté, la présidente du Conseil national des droits de l'Homme (CNDH), Amina Bouayach, a affirmé que "le Maroc est qualifié pour faire un saut qualitatif en matière d'abolition de la peine de mort", compte tenu des progrès accomplis dans l'instauration et le renforcement des libertés, ainsi que la cohésion et la solidarité sociale dont le Royaume a fait preuve durant la pandémie.
Elle a fait observer que la voie de l'abolition de la peine de mort, qui a été lancée il y a environ 30 ans, a connu des développements importants, citant notamment l’élargissement de la base des partisans de l'abolition, l’intégration du droit à la vie dans la Constitution et la non-application de la peine de mort.
Bouayach a estimé que "l'abolition de la peine de mort est le début d'une mise en œuvre tangible de la compatibilité entre le droit pénal, la Constitution et les chartes internationales".
Pour le président de l'Observatoire marocain des prisons, Abdellatif Rafoua, les débats politiques et sociales en cours sur l'abolition de la peine de mort nécessitent de trouver un équilibre entre la protection du droit à la vie et la préservation de l'ordre public.
Après avoir mis l’accent sur l’importance d’identifier des alternatives à cette peine, il a souligné l'importance de "créer de nouvelles formules de plaidoyer et de sensibilisation afin d'abolir complètement cette peine au Maroc".
S’exprimant à cette occasion, le directeur général de l’ONG française "Ensemble contre la peine de mort", Raphaël Chenuil-Hazan, a salué la forte implication de la société civile marocaine dans les efforts et initiatives visant à abolir la peine de mort.
"Nous sommes fiers de soutenir les initiatives de tous ceux qui sont fortement impliqués dans la bataille en cours pour arrêter l'application de cette peine et pour promouvoir la culture de son abolition", a déclaré Chenuil-Hazan.
Cette Assemblée générale, à laquelle participent des diplomates, des militants des droits de l'Homme marocains et étrangers et des hommes politiques, constitue l'occasion de présenter le bilan de la coalition et de sensibiliser les responsables et acteurs de diverses institutions à la peine de mort en tant que question prioritaire des droits de l'Homme.