L’obsession de l’hypothétique guerre.
Par Abdelhak Najib
Écrivain-Journaliste
Pourquoi dépenser autant de milliards de dollars dans des armes qui rouillent dans le sable du Sud de l’Algérie ? Cette obsession rappelle celle du colonel Kadhafi quand il avait amassé sur des dizaines de kilomètres dans le Sud libyen tout un arsenal composé d’avions de combat, de chars, de blindés, de véhicules amphibies et autres engins de guerre pour se rendre compte dix ans plus tard que tout avait cédé à la rouille et avait été bouffé en partie par le sable et le soleil implacable. Depuis plus de 60 ans, les dirigeants algériens qui se sont succédé recyclent la même erreur, amassant des armes qui ne servent à rien, à moins que les généraux algériens ne préparent leur Désert des Tartares selon Dino Buzzati. Sur ce chapitre, il faut se résoudre à cette évidence qui montre à quel point on peut se tromper face à l’Histoire et ses signaux. Les dépenses militaires en Afrique ont totalisé 51,6 milliards de dollars en 2023, soit une augmentation de 22 % par rapport à 2022. C’est ce qui ressort du dernier rapport de l’Institut international de recherche sur la paix de Stockholm (SIPRI) sur les dépenses militaires à l’échelle mondiale. Cela représente la plus grosse dépense au monde ces dix dernières années par un État qui souffre de graves crises successives au niveau social, politique, humain, avec l’un des niveaux de vie les plus décriés en Afrique du Nord. En effet, depuis 2014, la frénésie des armes a atteint des proportions effarantes en Algérie à tel enseigne que plusieurs rapports onusiens ont attiré l’attention des autorités algériennes sur la nécessité de changer de paradigmes en termes de budgets pour donner la chance à d’autres secteurs de se développer notamment l’agriculture, les infrastructures, le traitement de l’eau et l’industrie. En réponse, Alger a augmenté encore plus ses dépenses, puisque celles-ci ont atteint un pic de 76 % de hausse. Ce qui équivaut à 18,3 milliards de dollars, d’un seul coup. Ce qui constitue la plus grosse hausse de l’histoire de l’Algérie depuis 1974. « Il s’agit du niveau de dépenses le plus élevé jamais enregistré par l’Algérie », comme on peut le lire dans le rapport publié par l’institut de recherche SIPRI. Si l’on ramène ces taux au PIB algérien, on se rend compte des dysfonctionnements qui caractérisent la politique militaire à Alger. Dans ce sens, l’Algérie fait partie des 10 pays ayant les dépenses militaires les plus élevées par rapport à leur produit intérieur brut. Pire, dans ce classement qui rend compte du déséquilibre des dépenses et des gestions monétaires d’un État, l’Algérie est classée à la 3ème place sur les 10 pays qui allouent un budget colossal à l’armée et à l’achat d’armes. « L’augmentation de loin la plus importante de la charge militaire en Afrique a été enregistrée en Algérie, ce qui équivaut à +3,5 points de pourcentage », comme le souligne le SIPRI.
Selon les premières données stratégiques disponibles dans certains instituts d’études militaires, il ressort que le début de l’année 2024 est pire que les années précédentes, avec plus de 21,6 milliards de dollars déjà dépensés à fin mars 2024. Durant cette même période, le Maroc a considérablement réduit ses dépenses militaires, consacrant une partie de son budget à d’autres senteurs vitaux pour l’économie marocaine.