Donald Trump n'a jamais été un adepte de la subtilité en politique étrangère. Depuis son retour à la Maison-Blanche, le président américain a pris un virage radical, flirtant ouvertement avec des figures controversées de la scène internationale et chamboulant les équilibres géopolitiques établis.
Benjamin Netanyahu et Vladimir Poutine, deux dirigeants aux méthodes très discutables, sont devenus ses partenaires privilégiés.
Cette diplomatie, qui semble favoriser les oppresseurs et les agresseurs au détriment des opprimés, redessine les rapports de force mondiaux.
La cargaison d'armes lourdes débarquée dans la nuit de samedi à dimanche en Israël en est une parfaite illustration. Ces bombes MK-84, missiles et autres armes létales viennent renforcer la capacité militaire israélienne dans un conflit avec le Hamas qui a déjà coûté la vie à des dizaines de milliers de civils palestiniens.
Donald Trump, par son soutien total à Benjamin Netanyahu et cette livraison massive d'armes, dans le cadre d’une vente approuvée début février pour un montant total de 7,4 milliards de dollars, a envoyé un message clair : Israël a carte blanche.
Ce soutien indéfectible dépasse le simple cadre de la solidarité historique entre Washington et Tel-Aviv. Il devient un feu vert implicite pour les actions militaires israéliennes qui, très souvent, méprisent le droit international.
Le droit international ? Trump lui-même n’en a cure. C’est pourquoi d’ailleurs il a proposé un plan visant à expulser les habitants de Gaza vers l'Egypte et la Jordanie pour transformer la bande de Gaza en «Côte d'Azur du Moyen-Orient».
Ce plan, rejeté en bloc par les pays arabes, suscite indignation et consternation et illustre parfaitement son approche simpliste et déconnectée de la réalité régionale.
Penser que l'on peut déporter plus de deux millions de Palestiniens pour «reconstruire» un territoire dévasté par la guerre relève d'une naïveté géopolitique, doublée d'un cynisme désarmant.
Pourtant, Trump croit en son plan. En témoigne la visite, samedi, du secrétaire d'Etat américain, Marco Rubio, en Israël pour justement en discuter avec les dirigeants israéliens.
Dans le monde arabe, l’inquiétude est donc à son comble.
La réunion prévue le 20 février à Riyad entre cinq pays (Arabie saoudite, Egypte, Emirats arabes unis, Qatar et Jordanie) et l'Autorité palestinienne devrait, selon toute vraisemblance, se transformer en tribune de contestation face à ce projet absurde.
Ukraine : Un pont d'or pour Poutine ?
Pendant que le sort de Gaza est plus qu’incertain, l'Ukraine tremble. Volodymyr Zelensky a exprimé, lors de la Conférence de Munich, sa profonde inquiétude face à la volonté de Trump de négocier directement avec Vladimir Poutine sans impliquer ses partenaires européens.
«Pas de décision sur l'Ukraine sans l'Ukraine», a martelé le président ukrainien, conscient que les discussions américano-russes risquent de se solder par un accord désavantageux pour son pays.
Le tête-à-tête téléphonique entre Trump et Poutine et la promesse d'une rencontre prochaine sont un véritable avertissement pour l'Europe. Le président polonais Donald Tusk a d'ailleurs appelé à une réponse ferme et cohérente de la part des pays européens.
Car Trump, en cherchant à faire de l'Ukraine une monnaie d'échange, offre à Poutine une opportunité inespérée de stabiliser ses gains territoriaux et d'obtenir une reconnaissance tacite de son emprise sur le Donbass et la Crimée.
Affaiblie économiquement et militairement par des années de sanctions et de conflits, la Russie voit ainsi dans cette détente diplomatique avec les USA un levier pour redorer son blason international.
Mais pour l'Europe, c'est un coup de semonce. L'idée d'une paix imposée par Washington, sans garanties solides pour l'Ukraine, inquiète profondément les partenaires occidentaux.
Emmanuel Macron a convié des dirigeants européens à une réunion d'urgence lundi 17 févier à Paris, tandis que Zelensky tente de rallier ses alliés autour d’une stratégie commune.
La crainte est réelle : Trump pourrait sacrifier l'Ukraine sur l'autel de ses ambitions diplomatiques, offrant à Poutine une victoire inespérée. Et de taille !
De toute évidence, la politique étrangère de Donald Trump, qui oscille entre cynisme assumé et amateurisme dangereux, crée un climat général de défiance et d'instabilité.
En se rangeant du côté de figures autoritaires comme Netanyahu et Poutine, il sape les principes de la diplomatie multilatérale et fragilise les alliances traditionnelles : l'OTAN est ainsi à nouveau sur la sellette, tandis que les partenaires européens, face à cette Amérique imprévisible, cherchent désormais à mieux consolider leur alliance et à renforcer leurs capacités militaires.
Au Moyen-Orient, il est à craindre que le soutien inconditionnel à Israël et la marginalisation de la cause palestinienne n'enflamment davantage les tensions régionales.
En attendant, la planète reste suspendue aux tweets de Trump, à ses décrets et à ses décisions intempestives. Jusqu'où ira-t-il ?
F. Ouriaghli