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France/Procès des "écoutes": Sarkozy nie toute corruption

France/Procès des "écoutes": Sarkozy nie toute corruption

 

"Je veux être lavé de cette infamie": offensif à la barre du tribunal correctionnel de Paris, l'ancien président français Nicolas Sarkozy a commencé à "s'expliquer" lundi au procès des "écoutes" en contestant tout "acte de corruption".

 

"Madame la présidente, permettez-moi de dire de façon solennelle que j'ai attendu ce moment depuis longtemps (...) Je n'ai jamais commis le moindre acte de corruption, jamais", a déclaré l'ex-chef de l'Etat, des feuilles de papier disposées sur le pupitre devant lui.

Costume sombre, masque chirurgical sous le nez, Nicolas Sarkozy, 65 ans, promet de "répondre à toutes les questions". "Moi, je veux être lavé de cette infamie (...) je veux la vérité des faits, la vérité du droit, je dois m'expliquer".

Dans la salle d'audience remplie au maximum de la jauge autorisée pour cause d'épidémie de coronavirus, un silence quasi-religieux s'est fait. Au premier rang, ont pris place deux fils de l'ancien président.

Présent depuis l'ouverture le 23 novembre de ce procès inédit dans lequel il est jugé pour corruption et trafic d'influence, il ne s'était pas encore réellement exprimé.

L'image d'un ancien président à la barre est sans précédent sous la Ve République. Seul Jacques Chirac a été jugé et condamné en 2011 dans l'affaire des emplois fictifs de la Ville de Paris, mais sans avoir comparu à l'audience pour des raisons de santé.

L'affaire des "écoutes" a éclaté il y a près de sept ans. En février 2014, des juges enquêtant sur les soupçons de financement libyen de sa campagne présidentielle de 2007 découvrent l'existence d'une ligne officieuse entre Nicolas Sarkozy et son avocat Thierry Herzog, ouverte sous le nom de "Paul Bismuth".

"Vous avez devant vous un homme dont on a écouté plus de 3.700 conversations privées", rappelle Nicolas Sarkozy, dénonçant un "déchaînement" de moyens à son encontre. "Qu'ai-je fait pour mériter ça?", lance-t-il.

Au coeur de cette affaire : la notion du secret.

D'abord le secret du délibéré, que Gilbert Azibert, haut magistrat au sein de la Cour de cassation, est soupçonné d'avoir violé en 2014 en transmettant des informations à Nicolas Sarkozy, via son avocat et ami Thierry Herzog, sur un pourvoi en cassation lié à l'affaire Bettencourt (du nom de l'héritière du groupe L'Oréal).

A l'époque, l'ex-président avait obtenu un non-lieu dans ce dossier à Bordeaux, mais il cherchait à faire annuler par la haute juridiction la saisie de ses agendas présidentiels, susceptibles d'être utilisés dans d'autres dossiers.

En échange de ces informations voire d'une influence sur la procédure, Nicolas Sarkozy est soupçonné d'avoir donné un "coup de pouce" à Gilbert Azibert pour une nomination à Monaco. Poste qu'il n'a pas obtenu.

L'ancien haut magistrat, alors avocat général dans une chambre civile de la Cour de cassation, a réfuté ces accusations en bloc la semaine dernière à la barre. Son intérêt pour le dossier Bettencourt était strictement "juridique" et il n'a jamais tenté d'influencer ses collègues, a-t-il affirmé.

Le secret aussi des conversations entre un avocat et son client, que la défense estime piétiné par la mise sur écoute de Thierry Herzog et Nicolas Sarkozy.

Tout le dossier est en effet fondé sur des discussions entre les deux hommes, interceptées sur la ligne ouverte au nom de "Paul Bismuth", dans le cadre d'une autre affaire visant Nicolas Sarkozy : celle de soupçons de financement libyen de sa campagne présidentielle de 2007.

Brandi dès lundi par la défense, ce secret professionnel a été évoqué jeudi par le grand pénaliste Henri Leclerc, 86 ans, cité à la barre comme témoin, puis de nouveau invoqué par Me Herzog au début de son interrogatoire.

"Jamais je n'ai été un corrupteur", a martelé l'avocat, reconnaissant avoir voulu rendre un "service" à son ami Gilbert Azibert mais, a-t-il juré, ce n'était en aucun cas une "contrepartie".

La première semaine d'audience s'est déroulée dans un climat tendu entre le parquet national financier (PNF) et la défense, qui dénonce un "dossier poubelle".

De son côté, dans un réquisitoire sévère en octobre 2017, le parquet avait comparé les méthodes de Nicolas Sarkozy à celles d'"un délinquant chevronné".

Retraité de la vie politique depuis 2016, l'ex-président est encore très populaire au sein de son parti Les Républicains (droite).

Tout comme ses deux coprévenus, il encourt dix ans d'emprisonnement et un million d'euros d'amende pour corruption et trafic d'influence.

Le réquisitoire du PNF est attendu mardi, avant les plaidoiries de la défense. Le procès doit s'achever jeudi soir.

(AFP)

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