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Chômage : Sombre tableau

Chômage : Sombre tableau

Les dernières données du haut-commissariat au Plan relatives au marché du travail sont tombées : le taux de chômage est passé de 11,4% à 13,5% entre le troisième trimestre de 2022 et celui de 2023, avec 297.000 emplois perdus au cours de cette période. Ces chiffres donnent une photographie assez inquiétante du chômage au Maroc et montrent, tant s’en faut, l'incapacité chronique des gouvernements successifs à résoudre ce problème structurel.

Le secteur de l'industrie, censé offrir des opportunités d'emploi stables, a créé seulement 14.000 emplois, loin d'être suffisants pour compenser les pertes enregistrées notamment dans les secteurs de «l’agriculture, forêt et pêche» et des services.

On ne le dira jamais assez : l'une des causes fondamentales de la persistante de la problématique du chômage est la faiblesse de la croissance économique au Maroc. Une croissance insuffisante signifie moins d'opportunités d'emploi, ce qui laisse de nombreux citoyens en quête de travail sur le carreau. 
Et ce sont les jeunes qui sont les plus affectés, piégés dans un cercle vicieux de chômage et de désespoir, et incapables d’intégrer le marché du travail. Les taux de chômage les plus élevés sont observés chez les jeunes âgés de 15 à 24 ans, atteignant 38,2%. Parmi eux, les femmes et les diplômés sont très mal lotis, avec un taux de chômage de 19,8% pour chacun d'eux. Cela souligne également le besoin urgent de formations qui s'alignent sur les besoins du marché du travail, afin d'assurer que les diplômés soient mieux préparés pour les emplois disponibles.

Les jeunes, qui devraient normalement être la force motrice de l'économie, se retrouvent souvent désarmés face à un marché du travail qui ne parvient pas à les absorber. Leurs espoirs et aspirations sont continuellement contrecarrés par des opportunités d'emploi insuffisantes. Ils usent ainsi leur pantalon sur les bancs du chômage.

Parallèlement, le volume de sous-emploi a également augmenté, touchant 1.005.000 personnes au troisième trimestre 2023. Le taux de sous-emploi est passé de 8,5% à 9,6% au niveau national, reflétant une précarité accrue parmi ceux qui ont la chance d'avoir un emploi.

Au regard de ces données, les politiques visant à encourager l'entrepreneuriat, attirer les investissements et soutenir les petites et moyennes entreprises sont des leviers à activer pour stimuler la création d'emplois. Et au-delà des initiatives ponctuelles prises et de certains dispositifs sporadiques, il est impératif de prendre des mesures drastiques et audacieuses pour stimuler la croissance économique, diversifier les secteurs d'emploi et investir dans l'éducation et la formation pour mieux préparer la main-d'œuvre à un marché en constante évolution. Le nouveau modèle de développement semble justement être la réponse appropriée dans ce sens. Sauf que, pour l’instant, l’on est très loin de ses principaux objectifs arrêtés depuis mai 2021. Parmi eux, le doublement du PIB par habitant de 7.800 dollars (PPA) actuellement à 16.000 dollars en 2035. Concrètement, il s’agit d’atteindre un rythme moyen annuel de croissance supérieur à 6% à cet horizon. 

Une chimère ? Oui, pour l’instant en tout cas. Surtout au regard de la faiblesse des taux de croissance sur 3 ans : 1,3% en 2022, entre 2,5 - 3% en 2023, et entre 3,5 – 3,7% en 2024. En cause, le principal driver de la croissance, le secteur agricole en l’occurrence, reste très vulnérable aux aléas climatiques. Et il risque de l’être encore davantage les années à venir, dans un contexte où les changements climatiques mettent le Maroc à l’épreuve de sécheresses de plus en plus récurrentes et de plus en plus sévères.

D’où la diversification économique entamée depuis quelques années, à travers les nouveaux métiers mondiaux du Maroc, visant à réduire la dépendance à l'égard de l'agriculture et à créer de nouvelles opportunités d'emploi. Mais le PIB non agricole n’est pas suffisamment robuste pour absorber les déficits de croissance, surtout en période de sécheresse. 

Bref, le phénomène du chômage au Maroc révèle l'expression d'une problématique sous-jacente plus profonde, à savoir l'incapacité du pays à asseoir une économie inclusive, bénéfique à l'ensemble de ses citoyens. Tant que cette question fondamentale demeurera sans réponse adéquate, le fléau du chômage persistera comme une énigme insoluble.

 

Fatima Ouriaghli

 

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