Toutes choses égales par ailleurs, le coronavirus et le… coronavirusse, avec la vague Poutine, produisent les mêmes effets.
Vladimir Poutine fait trembler le monde. Poutine redistribue les cartes de la géopolitique en tenant en haleine et dans une incertitude déroutante la communauté internationale.
Poutine fait vaciller les équilibres précaires d’une économie mondiale à peine remise d’une longue crise sanitaire. Poutine est l’impudent chef d’orchestre de la chouannerie meurtrière qui a lieu en Ukraine : femmes, hommes, vieillards et enfants tombent sous les balles et les bombes.
Sa posture guerrière a ceci de pervers qu’il se joue non seulement de la communauté internationale en entretenant le flou absolu sur ses intentions réelles envers l’Ukraine, mais il manipule aussi insidieusement les marchés, tant celui des céréales que de l’énergie. Rappelons que, tout comme l’Ukraine, la Russie est un grenier à céréales : les deux pays en sont des exportateurs de rang mondial. Ils représentent 29% des exportations mondiales de blé (17% pour la Russie, 12% pour l'Ukraine), 15% de celles du maïs, mais aussi du colza, du tournesol, de l’orge….
En envahissant l’Ukraine pour déclencher un conflit majeur dans la région, Poutine a fortement perturbé le marché des céréales, créant de vives tensions sur la production et les prix, et déplaçant de fait cette guerre sur le terrain alimentaire. Au point que Antonio Guterres s’en est alarmé. «Nous devons faire tout notre possible pour éviter un ouragan de famine et l’effondrement du système alimentaire mondial», a notamment déclaré le secrétaire général de l’ONU.
Tous les pays qui dépendent du blé russe et ukrainien doivent donc s’inquiéter : ceux de l’Afrique subsaharienne, de l’Afrique du Nord, mais aussi du Moyen-Orient. Premier importateur mondial de blé, l’Egypte, par exemple, dépend entièrement de ces deux pays : elle en importe 60% de Russie et 40% d’Ukraine. Tout cela émeut-il Poutine ? Pas le moins du monde.
Dans une stratégie cynique mise en place depuis l’invasion de la Crimée en 2014 et les sanctions internationales qui s’en sont suivies, et peaufinée au fil du temps, il se sert plutôt du blé comme une arme. Avec un objectif aujourd’hui largement atteint, et qui prend l’économie mondiale en otage : Poutine a su rendre le monde dépendant de son blé, en boostant non seulement la production russe, mais aussi en la commercialisant à des prix très abordables. Aujourd’hui, il se livre à un véritable chantage au blé, privant tous ceux qui le critiquent de ses approvisionnements.
Comme dirait l’autre, on ne crache pas sur la main qui nous nourrit. Ainsi, le 15 mars, il a temporairement interdit les exportations de céréales vers quatre républiques exsoviétiques (Kazakhstan, Biélorussie, Arménie, Kirghizistan). C’est ce jeu vicieux qu’il duplique sur le marché du pétrole. Moscou a fait récemment capoter les négociations sur le nucléaire iranien qui étaient sur le point d’aboutir, afin de maintenir les cours du pétrole à un niveau élevé. La réactivation de cet accord permettrait en effet à l’Iran de revenir sur le marché mondial du pétrole avec quelque 1,3 à 1,5 million de barils/jour, ce qui atténuerait les tensions sur les prix.
Conséquences de ce jeu politico-économique pervers : la vague Poutine s’est disséminée partout et a rendu fiévreux les marchés mondiaux céréaliers et énergétiques, créant de véritables chocs inflationnistes. Alors, comment arrêter ce vi(russe) ? Bien malin celui qui saura répondre.
Par D. W