Poumon de l’économie nationale, le secteur agricole est aujourd’hui au bord de l’asphyxie. Rivières à sec, terrains jaunis, bétail affamé … Avec un déficit pluviométrique de 53% par rapport à l’année précédente, le Maroc subit, actuellement, l’une de ses pires sécheresses. Pour l’instant, les agriculteurs n’ont pas d’autres choix que de s’adapter.
Le déficit pluviométrique enregistré cette année évoque des inquiétudes sur les réserves d’eau du Maroc. Selon le World Resources Institute, le Royaume compte parmi les pays les plus menacés par une pénurie d’eau. Ce dernier occupe la 23ème place sur 165 contrées exposées au stress hydrique.
En première ligne face aux effets de la sécheresse, les agriculteurs se trouvent dans l’obligation d’adapter leur activité à des conditions climatiques globalement défavorables. Dans cette perspective, les professionnels du secteur jugent nécessaire de favoriser certaines cultures au détriment d’autres.
«Dans ce contexte marqué par la sécheresse et la pénurie d’eau, il est absolument primordial de privilégier les cultures hydroponiques qui ne consomment pas beaucoup d’eau, puisqu’elles se basent sur le système de réutilisation des eaux. Il est également essentiel d’encourager l’irrigation au goutte à goutte», estime Brahim El Anbi, ingénieur agricole.
Pour faire face au déficit pluviométrique et épargner les ressources hydriques du Maroc, Rachid Benali, vice-président de la Confédération marocaine de l'agriculture et du développement rural (Comader), insiste sur la nécessité de bien choisir ses cultures, notamment en abandonnant celles considérées comme étant très gourmandes en eau.
«Au Maroc, la sécheresse est devenue très récurrente. Ainsi, l’agriculture va être amenée à s’adapter à cette situation. Pour y parvenir, il faut d’abord éliminer et arrêter de subventionner les cultures qui exigent une grande quantité d’eau, notamment l’avocat, les pastèques et les agrumes», précise-t-il.
Dans ce sens, le ministre de l’Equipement et de l’Eau, Nizar Baraka, avait indiqué qu’il sera procédé au cours de ce mois de mars à la signature d’un contrat pour la protection de la nappe phréatique de Boudnib, région d’Errachidia. Dans le même ordre d’idées, Baraka avait annoncé la décision du gouvernement concernant l’interdiction cette année de la culture de la pastèque à Tata.
Compte tenu de la situation actuelle, le vice-président de la Comader considère par ailleurs qu’il faut se focaliser sur les cultures qui sont d’une nécessité absolue pour notre consommation journalière. «La priorité doit être donnée à la sécurité et la souveraineté alimentaire du Maroc. Nous importons beaucoup de produits du quotidien et ça nous coûte très cher. Il s’agit notamment du blé, du sucre et des huiles végétales. Il faut penser à prioriser ces cultures de première nécessité et qui pourtant ne sont pas très gourmandes en eau», fait savoir Benali.
Et de poursuivre : «Au lieu de planter des agrumes, nous pouvons cultiver de la betterave à sucre. De ce fait, nous allons à la fois réduire notre dépendance de l’étranger pour le sucre et économiser nos ressources en eau. De plus, un hectare de blé ne consomme pas beaucoup d’eau par rapport à un hectare d’agrumes, surtout que la culture de blé s’appuie sur l’irrigation d’appoint qui utilise une petite quantité d’eau.»
Outre la favorisation des cultures peu consommatrices d’eau et celles résistantes à la sécheresse, Rachid Benali rappelle également l’importance de construire plusieurs barrages collinaires et de recourir au transfert d’eau.
Par Meryem Ait Ouaanna