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Comment le Maroc est devenu une puissance aéronautique

Comment le Maroc est devenu une puissance aéronautique

En moins de trois décennies, le Maroc s’est imposé comme l’un des hubs aéronautiques les plus dynamiques au monde hors OCDE.

Ce succès n’est ni le fruit du hasard ni celui d’un effet d’aubaine. Il repose sur une stratégie industrielle de long terme, une vision royale claire et un écosystème cohérent qui attire aujourd’hui les plus grands noms du secteur mondial.

La cérémonie se voulait solennelle ce lundi 13 octobre. Devant le Roi Mohammed VI, accompagné du Prince héritier Moulay El Hassan, des personnalités de haut rang apposaient leurs signatures à trois conventions relatives à la réalisation du complexe industriel d’assemblage de «moteurs d’avions» du groupe Safran. 

Parmi les signataires, figurait le patron du grand groupe industriel français, Olivier Andriès qui, sur BFM Business, justifiera deux jours plus tard l’investissement dans cette usine de la somme colossale de 2,1 milliard de dirhams par le «choix évident» que constitue désormais le Maroc «pour Safran».

Une évidence qui ne s’est pas construite en un jour, mais est le fruit d’un travail de longue haleine.

Dès le début des années 2000, le Roi Mohammed VI a fait de l’industrialisation un levier central de modernisation économique. Cette politique a combiné stabilité politique, infrastructures de pointe et formation ciblée, avec un objectif assumé : faire du Maroc une base industrielle mondiale compétitive.

L’aéronautique, considérée comme un secteur d’excellence, a accompagné cette dynamique par l’investissement dans les zones franches de Midparc à Nouaceur, dans les infrastructures de Tanger Med et dans un dispositif de formation spécialisé, notamment l’Institut des métiers de l’aéronautique (IMA).

Safran, symbole d’une montée en gamme

Le groupe français Safran incarne mieux que quiconque cette montée en puissance. Présent depuis 25 ans au Maroc, il y emploie désormais 5.000 salariés, un effectif qui fait du Royaume son premier pôle industriel hors de France.

Lors de son passage sur BFM Business, Olivier Andriès a salué “les talents, les infrastructures modernes et les conditions d’accueil” offertes par le Maroc. 

Situé à Nouasseur, le complexe industriel de moteurs d’avions inauguré par le Roi Mohammed VI comprend une usine d’assemblage et de test de moteurs LEAP (utilisés par Airbus et Boeing) et une unité de maintenance et de réparation. 

Une infrastructure qui positionne le Maroc dans la cour des grands pays producteurs d’équipements aéronautiques, avec une expertise désormais reconnue dans les moteurs, les nacelles et les composites.

L’installation de Safran s’inscrit dans un écosystème aéronautique désormais mature. Autour de Casablanca, Tanger et Midparc, plus de 140 entreprises travaillent pour les principaux avionneurs mondiaux.

Parmi elles : Airbus Atlantic, pour les structures d’avions; Boeing, partenaire du Moroccan Aerospace Ecosystem; Collins Aerospace et Spirit AeroSystems, acteurs des systèmes embarqués et des structures composites; Thales, dans l’avionique et l’électronique; Hexcel et Stelia Aerospace, spécialisés dans les matériaux de pointe; et Sabca Maroc, pour l’assemblage et la maintenance.

Ces entreprises forment un maillage complet, appuyé par des PME marocaines certifiées EN9100 et par une chaîne logistique efficace reliant Casablanca, Tanger et l’Europe en quelques heures.


Le capital humain, colonne vertébrale du modèle

Mais le véritable moteur de la réussite marocaine reste son capital humain. Les ingénieurs issus des grandes écoles marocaines (EMI, ENSAM, UIR, ISCAE) et les techniciens formés dans les instituts spécialisés constituent une main-d’œuvre hautement qualifiée et reconnue à l’international. 

La stratégie marocaine a consisté à former avant d’attirer. Les industriels trouvent aujourd’hui dans le Royaume des équipes capables de répondre aux standards les plus exigeants du secteur aérien. 

Le patron de Safran loue d’ailleurs les écoles d'ingénieurs "formidables" dont dispose le Maroc. Un vivier qui permet au géant de l’aéronautique de disposer, selon lui, de «talents extraordinaires, engagés, enthousiastes et au meilleur niveau de performance opérationnelle».

Le taux d’intégration locale dépasse, quant à lui 40%, un niveau rare pour une industrie de haute précision.

La pandémie, les tensions géopolitiques et la reconfiguration des chaînes d’approvisionnement mondiales ont renforcé la position du Maroc. Les grands groupes cherchent désormais des bases industrielles fiables, proches de l’Europe, stables politiquement et compétitives. Le Maroc coche toutes les cases.

Les usines de Casablanca, Tanger et Nouaceur permettent aux groupes étrangers de diversifier leurs sites de production, tout en bénéficiant de la qualité opérationnelle marocaine. Safran a d’ailleurs adopté une logique de double source : répartir la fabrication entre la France et le Maroc pour sécuriser ses chaînes d’approvisionnement.

Une filière stratégique

Aujourd’hui, l’aéronautique marocaine emploie plus de 20.000 personnes, génère plus de 26 milliards de dollars d’exportations par an et affiche un taux de croissance moyen de 15 % sur la dernière décennie.
 

Le secteur contribue à environ 2 % du PIB national, tout en tirant vers le haut des métiers d’ingénierie, de maintenance et de conception. Le Royaume fait désormais partie des cinq premières bases aéronautiques mondiales hors OCDE, un statut consolidé par la confiance renouvelée des investisseurs.

Le modèle marocain de développement aéronautique repose désormais sur un triptyque solide : vision stratégique, capital humain et infrastructures performantes.

Par Reda Mouhsine

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