L’image de la première dame de France, Brigitte Macron, posant avec les princesses royales marocaines Lalla Meryem, Lalla Asmaa et Lalla Hasnaa, a fait l’effet d’une bombe politique et diplomatique.
Mustapha Tossa
En temps normal, cet événement aurait pu se contenter d’être un grand événement people et iconique que des magazines sur papier glacé auraient pu s’arracher avec gourmandise. Mais aujourd’hui, le même événement incarne une importante accélération politique dans la relation entre les deux pays.
Il est vrai que Brigitte Macron, épouse du Président de la république, n’a pas de fonction politique identifiée. Elle se contente d’être la première dame avec des activités symboliques mais dans le cas du couple Macron, les Français ont depuis longtemps saisi son influence manifeste sur les convictions et les choix politiques de son Président d’époux. Ils ne s’en offusquent pas davantage, sachant la relation très particulière qui avait construit leur trajectoire conjugale.
Mais c’est la première fois que Brigitte Macron se livre à ce qui peut s’apparenter à un projet de réconciliation politique entre deux pays dont les relations traversent une période difficile et divergente. Recevoir les princesses royales à déjeuner au Palais de l’Elysée est tout sauf anodin. Aussi bien la presse française que les réseaux sociaux ne se sont pas trompés sur la valeur politique inédite de cet événement. Le fameux déjeuner de l’Elysée s’est fait, bien entendu, avec le consentement et le feu vert du Roi Mohammed VI, et Emmanuel Macron est descendu saluer les princesses royales. Il est donc aisé d’imaginer ce tableau idyllique rempli de messages et de promesses politiques.
Et l’on apprend par la même occasion que le Président français Emmanuel Macron et le Roi Mohammed VI se sont récemment entretenus au téléphone. Ce qui est, vu la rareté de leurs contacts et la sécheresse des relations à haut niveau entre les deux pays depuis un certain temps, un véritable événement qui annonce l’embellie diplomatique dont tout le monde parle ces derniers temps dans l’axe Paris/Rabat.
En réalité, ce qui aggravait cette crise franco-marocaine est que les pays ont divergé sur des questions stratégiques et vitales pour leurs partenariats, mais que cette crise avait aussi abîmé la qualité des relations personnelles entre les deux chefs d’Etat au point de provoquer cette distanciation, inhabituelle dans les relations entre les deux pays. On se rappelle des relations extrêmement proches que des Présidents importants de la république comme Jacques Chirac et Nicolas Sarkozy entretenaient avec la famille royale marocaine. On se rappelle aussi des relations teintées de respect et d’estime, malgré des divergences politiques que des Présidents socialistes comme François Mitterrand ou François Hollande nourrissaient à l’égard de la famille royale.
Aujourd’hui, une diplomatie familiale entre les deux pays est à l’œuvre pour tenter de recoudre les précieux fils de la relation franco-marocaine. Elle ambitionne de donner un signal politique fort que sa normalisation et son réchauffement sont en cours et que les deux pays sont prêts à entamer une nouvelle phase de leurs liens basée sur la confiance et le pari sur l’avenir.
Ces évolutions majeures incarnées par les déclarations du ministre des Affaires étrangères, Stéphane Séjourné, et de l’ambassadeur, Christophe Lecourtier, et aujourd’hui avec cette image très parlante politiquement réunissant à l’Elysée Brigitte Macron et les princesses royales sont là pour indiquer que les deux pays s’apprêtent à lancer une nouvelle phase de leurs partenariats stratégiques. Elle ne sera sans aucun doute efficace et constructive que sur la base d’une résolution française des divergences originelles qui avaient conduit à cette crise et participé à son maintien pendant de longs mois, voire des années.
Les princesses royales à l’Elysée annoncent que le dégel dans la très précieuse relation entre la France et le Maroc est en état très avancé et que les retrouvailles au sens large du terme entre les deux pays sont plus proches que jamais. Et c’est à ce genre de messages hautement politiques que peut servir un déjeuner à l’apparence anodine mais dont le sens reflète une importante accélération dans les relations entre deux pays qui se tournaient progressivement le dos et qui seraient demain heureux de se retrouver sur la base d’un nouveau contrat de confiance.