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Quality Leaders Summit : Le Maroc, un îlot de stabilité financière ?

Quality Leaders Summit : Le Maroc, un îlot de stabilité financière ?

Coface Maghreb a ouvert ce 21 novembre 2025 à Casablanca, la première édition du Quality Leaders Summit. Une plateforme de réflexion et d’échange qui a réuni un parterre de leaders économiques, institutionnels et financiers autour des thématiques clés d’excellence financière, de gouvernance responsable, d’enjeux de fiabilité et de performance des entreprises, dans un contexte économique mondial de plus en plus incertain.

Dressant un panorama des perspectives économiques mondiales avec son lot de crises géopolitiques, d’inflation et d’instabilité des marchés, Jean-Christophe Caffet, économiste chez Coface et keynote Speaker, a appelé les entreprises à renforcer leur solidité, leur rigueur et leur transparence. Selon le dernier Risk Review de Coface, l’on prévoit une croissance modérée de 2,6% en 2025, avec des risques politiques, des tensions sur les chaînes d’approvisionnement et une hausse des insolvabilités, notamment dans les marchés développés. Dans ce contexte, l’excellence financière est essentielle à la survie des entreprises. 

Le Maroc : Un cas d’école

L’excellence financière marocaine a été au centre du premier panel intitulé : «Naviguer dans l’incertitude mondiale : l’excellence financière comme levier de stabilité». Autour de la table, les intervenants ont livré un diagnostic démontrant que la solidité du modèle marocain n’est pas un hasard, mais le résultat d’une stratégie financière construite dans la durée.

D’entrée de jeu, Youssef Rouissi, Directeur général délégué d’Attijariwafa bank, a affirmé que si le Maroc encaisse mieux que d’autres les chocs venus de l’étranger, c’est largement grâce à ses banques. Il rappelle que «le marché domestique de la dette est suffisamment profond pour absorber les secousses des taux d’intérêt. Les banques y jouent un rôle de stabilisateur, en assurant la liquidité et la visibilité dans la formation des prix». Et d’ajouter qu’«elles ont démontré leur réactivité pendant la crise du Covid, où près de 8% du PIB ont été mobilisés en prêts garantis pour éviter une vague de défaillances». Une injection massive d’oxygène qui a sauvé des milliers d’entreprises.

Une analyse que partage Fadwa Hosni, PDG de BMCE Capital Global Research. Pour elle, le Maroc repose sur une intermédiation forte. «Entre 80 et 85% du financement des entreprises proviennent du secteur bancaire». Un modèle parfois critiqué, mais qui a prouvé sa robustesse. Le taux de transformation bancaire avoisine les 95%, l’épargne nationale progresse régulièrement, et la diversification des financements limite la propagation des chocs sectoriels. «Notre croissance repose d’abord sur la banque, pas sur les marchés financiers», résume-t-elle. Et c’est précisément ce qui a permis d’éviter les emballements spéculatifs observés ailleurs.

Prenant la parole, Gilles Abensour, PDG de Saint-Gobain Maroc, a illustré le lien entre stabilité financière et performance industrielle. Il a évoqué la trajectoire spectaculaire du secteur automobile marocain devenu en une décennie le premier secteur exportateur du pays. 

Le Maroc est désormais une plateforme mondiale, alimentée par des zones industrielles compétitives, une visibilité monétaire et une énergie verte de plus en plus abondante. «Nos usines tournent à près de 90% d’énergie décarbonée», affirme le patron de Saint-Gobin, un atout décisif face aux exigences européennes.

Toutefois, il pointe surtout un facteur clé de la stabilité du Dirham. «Une variation de 4 à 5% peut faire disparaître la marge d’un équipementier», précise le PDG. Pour un pays orienté vers l’export, la maîtrise du change devient un avantage compétitif essentiel d’attractivité industrielle.

Interrogés sur la prudence monétaire du Maroc, les intervenants s’accordent à dire qu’elle ne freine pas la croissance, au contraire. Dans une période volatile, un Dirham stable, une inflation maîtrisée et des réserves de change élevées offrent au pays une visibilité rare dans la région.

Les vulnérabilités africaines : un rappel à la prudence

Le spectre de la discussion a été élargi à l’échelle continentale par Aaron Chaudhuri, économiste Afrique chez Coface. En effet, les risques africains se structurent selon deux axes, explique-t-il. Des risques macroéconomiques (endettement public, vulnérabilité alimentaire, comptes extérieurs fragiles) et des risques sociopolitiques nourris par les inégalités. Le risque climatique, lui, joue désormais un rôle déterminant, particulièrement dans les pays où l’agriculture concentre une grande partie de l’emploi et des revenus. Le Maroc, bien que plus diversifié, n’y échappe pas.

Le panel s’est soldé sur deux enjeux à venir. D’abord, la transformation digitale et l’intelligence artificielle. Pour Rouissi, l’IA «fluidifiera la relation banque-entreprise, améliorera les modèles de risque et augmentera la productivité». 

Ensuite, à la question sensible des délais de paiement, il mise sur la “supply chain finance” comme piste de solution. Grâce aux plateformes de «confirming digitalisé», une PME peut être payée en 48 heures, même si son principal client règle à 120 jours, réduisant ainsi un risque chronique de trésorerie auquel sont exposées les TPE/PME.

In fine, le Maroc a su construire une stabilité financière enviée dans un environnement mondial incertain. Mais cette solidité devra désormais s’appuyer sur trois priorités : accélérer la digitalisation, renforcer la finance verte et contenir les risques liés au climat. Une feuille de route indispensable pour continuer à tenir le cap dans la tempête.

 

D.M.

 

 

 

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