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France-Algérie : Macron sonne la fin de la diplomatie indulgente

France-Algérie : Macron sonne la fin de la diplomatie indulgente

Fini les gestes symboliques et les silences diplomatiques. Emmanuel Macron rompt avec la ligne conciliante de ces dernières années et opte pour une posture de fermeté assumée. Suspension des visas, gel consulaire, condamnation des arrestations arbitraires : Paris sort l’artillerie diplomatique et place Alger face à ses responsabilités.

C’est un nouveau revers cuisant pour le régime algérien. Dans une lettre sans équivoque adressée à son Premier ministre François Bayrou, le président français Emmanuel Macron a exigé une série de mesures fermes contre Alger, mettant fin à ce qu’il qualifie, à demi-mot, de diplomatie naïve. Les mots sont durs, les décisions lourdes de sens. Objectif : faire payer à l’Algérie son intransigeance migratoire et la détention jugée arbitraire de deux ressortissants français.

Cette missive, publiée mardi dans Le Figaro, marque un virage stratégique dans la politique étrangère française. Macron, qui assurait il y a encore quelques mois vouloir «tourner la page» des tensions, choisit désormais la confrontation assumée. "La France doit être forte et se faire respecter", assène-t-il. Un message clair : Alger ne peut plus impunément bloquer le dialogue tout en espérant bénéficier des privilèges diplomatiques.

Première mesure choc : la suspension de l’accord bilatéral de 2013, qui permettait aux détenteurs de passeports diplomatiques et de service algériens de circuler sans visa. Désormais, les élites du régime algérien seront logées à la même enseigne que les citoyens ordinaires. Plus encore : Paris active le "levier visa-réadmission", un mécanisme introduit dans la loi immigration de 2024, pour refuser visas de court et long séjour à ceux qui ne coopèrent pas au retour des clandestins.

La France va jusqu’à demander aux autres États Schengen de fermer la porte aux diplomates algériens transitant par des pays tiers. Une mesure rare, révélatrice de la gravité du climat entre les deux capitales.

 

Les cas Sansal et Gleizes : la goutte de trop

Mais c’est surtout la détention en Algérie de l’écrivain Boualem Sansal et du journaliste Christophe Gleizes qui semble avoir fait basculer l’Élysée dans une posture offensive. Le premier a été condamné à cinq ans de prison pour "atteinte à l’unité nationale", le second à sept ans pour "apologie du terrorisme". Deux figures critiques du régime algérien, que Paris considère comme des otages diplomatiques.
La demande de leur libération s’accompagne désormais de sanctions concrètes, loin du silence poli qui régnait jusqu’ici. Macron fait de leur sort un symbole de l’impasse actuelle : pas de dialogue sans respect des droits fondamentaux.

Autre point de rupture : le refus obstiné d’Alger de reprendre ses ressortissants en situation irrégulière. Près de 120 personnes sous OQTF (obligation de quitter le territoire français) attendent d’être renvoyées, sans réponse des autorités algériennes. Pire encore : les 18 consulats algériens en France ont cessé toute coopération avec les services français, paralysant les procédures administratives.

Face à ce gel unilatéral, Macron ne mâche plus ses mots. Il demande à son ministre de l’Intérieur, Bruno Retailleau, de multiplier les expulsions, de surveiller de près la délinquance d’origine algérienne, et de négocier un canal de communication "utile" avec Alger. Une manière d’officialiser le changement de ton à Paris : fini la complaisance, place au bras de fer.

La suite ? Elle dépendra, écrit Macron, de la "réponse des autorités algériennes à nos exigences". Tant que la coopération consulaire ne sera pas rétablie, les consuls algériens encore en attente resteront bloqués. Et une normalisation complète passera aussi par des discussions franches sur des dossiers sensibles : dette hospitalière, interférences des services algériens en France, et bien sûr, mémoire coloniale.

Dans les couloirs de l’Élysée, on parle encore d’un «espoir de reprise du dialogue». Mais la méthode a changé. Macron veut des résultats, pas des gestes symboliques. Et pour la première fois depuis longtemps, Paris semble prêt à assumer un rapport de force frontal avec Alger.

 

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